Avant le 12e siècle
Au 8e siècle, le château fort de Faverney appartient à un seigneur bourguignon nommé Widrade (ou Wideradus).
En 722, il y fonde une abbaye de moniales.
Que sait-on de la vie des religieuses de Faverney ? Peu de choses en réalité...
- Au 9e siècle, les actes des partages successifs de ce qui fut l'empire de Charlemagne font mention de l'abbaye Sainte Marie de Faverney. Elle est comptée au nombre des bénéfices les plus importants.
- Au cours du siècle suivant, l'abbaye est donnée par le comte de Bourgogne à un seigneur nommé ADALARD et à son épouse.
- L'histoire du martyre des saints Berthaire et Attalein (vers l’an 770) fait apparaître Gude, supérieure des moniales de Faverney.
- Au 11e siècle, Luce (en 1031) et Euphémie (en 1066) font serment de fidélité à la règle de Saint Benoît et à l'archevêque de Besançon.
- Odiarde, vers 1130, tente de ramener l'ordre, la discipline et la prospérité dans l'abbaye en pleine décadence. En vain...
Odiarde sera la dernière abbesse de Faverney.
12e et 13e siècles
En 1132, par acte signé à Besançon, le monastère de Faverney est donné aux bénédictins de la Chaise-Dieu.
Le 8 novembre de cette même année, les quatorze premiers religieux bénédictins de Faverney pénètrent dans le sanctuaire de l'abbaye en ruine.
Les années qui suivent sont placées sous le signe de multiples querelles engagées entre l'abbé Bernard de Faverney, soucieux de faire reconnaître les droits de sa nouvelle abbaye, et ses voisins : communautés cisterciennes (de Clairefontaine et Cherlieu) et seigneurs.
... Les successeurs de Bernard sauront se montrer plus conciliants, plus généreux aussi.
Dès lors, au fil des années, l'abbaye de Faverney gagne son indépendance, marque son autorité et se développe économiquement...
C'est ainsi que sous l'abbatiat de Pierre III (1250-1266), deux faits importants modifient la vie de l'abbaye et de la cité :
- l'abbaye est rattachée directement à la Chaise-Dieu, et non plus de l'archevêque de Besançon.
- un acte de 1260 affirme solennellement les "franchises" des bourgeois de Faverney, mais aussi la reconnaissance pour l'abbé et les religieux, de leur qualité de "seigneurs du lieu"./li>
14e et 15e siècles
La prospérité économique ne manque pas d'avoir des conséquences préjudiciables :
- convoitise des seigneurs, comtes, princes... qui assurent le "gardiennage" de l'abbaye,
- révolte des habitants de Faverney, accablés d'impôts et d'amendes...
- décadence intellectuelle et religieuse à l'intérieur même de la maison bénédictine.
Pourtant, en 1410, l'abbé de Faverney se voit reconnaître, par le Pape, le droit de "porter l'anneau" et "d'officier mitre en tête et crosse en main".
Dès la deuxième moitié du 15e siècle, au déclin de la vie morale et religieuse de l'abbaye vont s'ajouter d'énormes difficultés matérielles. Les causes principales en sont connues.
- D'une part, aux "écorcheurs", soudards sinistres, soldats licenciés transformés en brigands... ravageant systématiquement le pays, succèdent le roi de France Louis XI et ses alliés qui mènent leur guerre de conquête contre la Comté.
- D'autre part, le système de "la commende" porte à la tête de l'abbaye des individus qui ne cherchent qu'à en tirer le maximum de bénéfices (en se mettant souvent au service des seigneurs voisins).
En 1486, il ne reste plus à Faverney que quatre religieux dans une abbaye dévastée !
16e et 17e siècles
Au cours du 16e siècle "l'hérésie protestante" gagne la région de Faverney. "Le château d'Amance (en particulier) devient un foyer ardent de propagande au grand jour."
En 1569, vingt mille hommes, "avec l'approbation des princes protestants" sèment la terreur dans le baillage d'Amont.
Au mois de mars Faverney est envahie et incendiée. L'église, l'abbaye, le palais de l'abbé sont ravagés et pillés.
Mais la poussée protestante s'affaiblit à l'aube du 17e siècle. Les hérétiques du secteur font l'objet de procès et de condamnations... La paix commence à se rétablir.
Pour autant, à la veille du Miracle de 1608, l'abbaye de Faverney offre un sinistre témoignage. Six religieux seulement (sans abbé) y sont livrés à eux-mêmes : plus de salle capitulaire, plus de bibliothèque, plus de réfectoire, plus de costume religieux, plus d'office divin... plus aucune vie régulière.
Plus de "clôture" non plus : on entre et on sort du monastère comme l'on veut, à n'importe quelle heure du jour et de la nuit !
« En un mot, depuis plus de cent ans la règle bénédictine n'y (est plus) ni lue, ni expliquée, ni méditée, ni observée : même elle y (est) inconnue...».
En 1612, Dom Alphonse Doresmieux, nouvel abbé de Faverney engage son abbaye dans la voie de la réforme de Saint-Vanne et Saint-Hydulphe.
Douze nouveaux moines et leur prieur prennent possession du monastère et de ses biens pour y vivre "dans la stricte observance" de la règle.
Les anciens religieux de Faverney demeurent quant à eux dans la communauté mais ne sont pas soumis à la réforme, jouissant de ce fait d'un statut "privilégié".
S'ouvre alors une période de reconstruction, de ferveur intellectuelle et religieuse...
Prospérité troublée malheureusement, dès 1635, par de nouvelles tragédies liées, de près ou de loin, à la "Guerre de Dix Ans" : crimes, pillages, dévastations, famine, peste...
La paix revenue, le monastère "croît en sciences et en sainteté, et grandit en réputation et en influence".
Mais, encore une fois, la paix ne sera que de courte durée...
A deux reprises en effet (en 1668 et en 1674) Louis XIV, roi de France, se lance à la conquête de la Franche-Comté que le traité de Nimègue rattache finalement à la France le 17 septembre 1678.
18e siècle
Au début de 1789, dans leur "cahier des doléances", les habitants de Faverney portent contre les bénédictins, les plaintes et les accusations les plus sévères : "... moines usurpateurs... causant la perte de la commune. Habitants spoliés et accablés d'amendes... Fermiers (au service des moines) s'érigeant en maîtres, dévastant les forêts..."
Après le 5 mai, les événements nationaux se précipitent : nationalisation des biens du clergé, prohibition des vœux monastiques, illégalité des congrégations...
A Faverney, dès le printemps 1790, inventaires des biens, droits et revenus de l'abbaye sont dressés.
Fin avril, les vingt-deux bénédictins doivent choisir : ils poursuivent la vie religieuse dans une maison désignée par l'Etat ou ils retrouvent une vie hors communauté. Quinze optent pour cette liberté et quittent définitivement l'abbaye au mois d'août.
Au début de 1791, les biens de l'abbaye ayant été déclarés propriété de l'Etat, leur vente publique commence.
A cette même époque, après avoir prêté serment à la Constitution, les sept religieux qui avaient choisi de continuer la vie en communauté se voient assigner l'abbaye de Luxeuil comme lieu de résidence... Ils optent finalement pour la liberté et se dispersent tour à tour.
Ainsi, en mai 1791, les deux derniers bénédictins de Faverney quittent le monastère.
722 – 1791... L'abbaye de Faverney aura vécu mille soixante-neuf ans !